Maîtresse Saylie

La cage de chasteté : le plaisir de renoncer à sa virilité

L’utilisation d’une cage de chasteté n’apparaît pas tout de suite, pas systématiquement propice à éprouver du plaisir si l’on s’en tient aux schémas sexuels traditionnels.
Car c’est justement la sexualité classique, la hiérarchie phallique (certes partiellement déconstruite en occident depuis quelques années, mais elle se montre tenace à bien des égards) qui se retrouve prise à revers durant une session au donjon.
Tu te demandes sûrement de quelle manière. Tu aimerais comprendre les mécanismes sociaux, psychologiques en jeu. Et j’en suis ravie. 
Car une rencontre BDSM réussie, virtuelle ou réelle, doit selon moi toujours impliquer une part d’érudition. D’esprit. Non de pédantisme, mais d’ouverture. Elle titille, déconstruit, met à mal nos représentations communes. Elle donne cette place au tabou qui, par essence, s’étouffe généralement sous la bien-pensance ambiante – le qualificatif est faible.
La matérialisation apparaît alors comme un moyen puissant d’acérer, d’aiguiser, de donner forme et feu aux plaisirs. 
C’est justement d’un accessoire, d’un dispositif en particulier dont ce billet va évoquer les délices.
La cage de chasteté, donc.

Cage et ceintures de chasteté : attention aux clichés

L’idée de la reine, de la dame contrainte à porter une ceinture de chasteté au Moyen-Âge tandis que son époux guerroyait au loin… nous semble correspondre à une réalité historique. 
Pourtant, non. 
Si l’on ne peut jamais être catégorique lorsqu’on étudie et relate le passé, car il y a des subtilités, des exceptions que le temps n’a pas sauvegardées… il semblerait que ça n’ait jamais été une pratique courante ; ça n’a sans doute même pas existé. 
En fait, et comme souvent, le fantasme l’emporte. Cette époque rêvée, réécrite où la soumission était légion devient le socle d’un fétichisme moderne, quitte à inventer, à ajouter, à compléter au gré de ses désirs.
La cage de chasteté, destinée aux hommes… tout comme la ceinture de chasteté, attribuée aux femmes, ne sont pas des reliques médiévales. Sous leur forme actuelle, ce sont plutôt les reliques, les résidus (sans connotation péjorative) d’un désir de soumission, tout comme du plaisir de domination selon la place prise. 

Et l’imaginaire de la torture, celle des donjons intemporels, des antichambres millénaires, l’emporte sur les considérations historiques.
Je n’entends pas dévaloriser la démarche scientifique par ces propos, bien entendu. Il est intéressant – important – de savoir distinguer la projection (ou la rétroprojection) des faits.
Mais en tant que dominatrice, c’est surtout à l’aspect psychologique que je m’intéresse. Pour lequel je me captive. Et je suis certaine qu’il te charmera aussi. 

BDSM Paris Paddle
BDSM Paris Paddle

La cage de chasteté : qu’est-ce que c’est ?

Quittons la ceinture pour nous concentrer sur la cage ; celle qu’il m’arrive de faire porter aux soumis.
Il en existe plusieurs modèles, plusieurs variantes. Le principe reste le même, peu ou prou : c’est celui d’une castration temporaire. 
J’insiste sur le « temporaire », car les organes génitaux ne se retrouvent pas définitivement privés de leur potentiel érectile. Pas plus que de leur pouvoir reproducteur. Nous sommes, c’est toujours le cas en BDSM, dans l’idée d’un jeu. Il n’y a pas de fatalité, de castralisme (j’ose les néologismes) pérenne dans cette configuration. 
Il n’en résulte pas moins une parenthèse délicieuse, plus ou moins longue selon notre contrat. Lorsque tu portes la cage de chasteté, ton phallus se retrouve engoncé. Tu peux uriner, mais tu ne peux plus bander, pour parler trivialement. Le pénis devient kiki, rikiki, kit pathétique réduit à peau de chagrin. 
Tu renonces à ta précieuse virilité. Mieux encore : j’en ai la clé. Oui, c’est ta dominatrice qui te permettra – si elle le désire – de te rendre cette verge, d’en permettre à nouveau le gonflement, d’envisager une pénétration avec tes partenaires sexuels.
En attendant, le mécanisme est étudié pour annuler ta puissance. Comme souvent, c’est de cette inversion que naît la jouissance.

Entre symbolique et matérialité : les nuances d’une cage de chasteté 

Si l’on prend l’exemple du dog training, le masque de chien, en tant que tel, n’a aucune fonction pratique. 
Il est absolument symbolique, il ne sert à rien dans le sens matériel du terme. Là où l’intérêt réside, c’est dans sa manière de figurer la soumission. Le concept du chien, du chien-chien, prend des traits familiers, quoique suffisamment érotisés pour ne pas basculer dans la sexualisation de la bête en tant que telle. 
La cage de chasteté, elle…

A une dimension technique. Elle contribue vraiment à rétrécir, priver, ridiculiser les parties génitales.

Est chargée sur le plan symbolique : véritable prison pour le phallus, elle affiche l’austérité du métal – dans ses versions plus onéreuses – rappelant par ses petits barreaux, par son cadenas, par ses anneaux castrateurs, ce qu’elle inflige au sexe masculin.

C’est cette double nature qui en fait un instrument de soumission puissant. Un outil SM complet, précieux, qui se charge d’un infini d’allégories tout en contribuant à l’exercice. 
Un accessoire qui, dès lors que le soumis a lâché prise, peut ouvrir la voie à des frissons, à des satisfactions de toutes sortes.
Comment ? J’y viens.

Maitresse BDSM Dominatrice Paris
Maitresse BDSM Dominatrice Paris

La cage de chasteté : comment survient le plaisir ?

En BDSM, il est strictement nécessaire de renoncer aux pensées limitantes. Le sadomasochisme se veut au chantre de l’anticonformisme, pour ne pas dire de la contre-intuitivité.
Voilà ce qui peut rendre le jeu tout simplement exceptionnel. 
Tu n’as plus à pouvoir. Tu n’as plus à ériger. Tu n’as plus à prouver.
Les pannes érectiles ? Ta dominatrice s’en moque. Les pulsions qu’il faut/qu’il semble falloir assouvir par la masturbation, celles qui te mènent jusqu’aux catégories les plus rocambolesque d’un site porno ? Il est temps d’y renoncer.
Et ce pour goûter aux délices de la chasteté. 

Dominatrice fétichisme fouet

Avertissement important


En aucun cas cette situation particulière ne doit conduire à une mise en danger du soumis. Le choix du dispositif se fait de manière précautionneuse. On évitera par exemple de l’exposer à des allergies.
Aussi, au moment d’établir le contrat initial, des modalités de sortie sont à prévoir. Même si la contrainte fait tout le seul du jeu, il doit être possible de libérer le pénis en cas d’urgence.

Dominatrice fétichisme fouet

Un art qui se cultive. Sachant que chaque esquisse sous les draps, chaque application de la langue ne donnera pas forcément à réaliser un chef d’œuvre. Qu’importe, c’est aussi ça qui rend la rencontre sexuelle si grisante : rien n’est jamais acquis. 

BDSM CBT Dominatrice Paris
BDSM CBT Dominatrice Paris

La chasteté ou la poursuite d’une moralité perdue

Revenons-en à nos délices. 
J’aime interroger les mots. Connaître leur origine. Leur étymologie.
Le mot « chaste » a été construit à partir du terme latin « castus ». Et, surprise (sauf si tu le savais déjà) : il y a une racine commune avec le mot… « caste ».
La caste suppose une obédience à des principes. À une morale. À des codes. Faire preuve de chasteté, c’est quitter le vice pour renouer avec la vertu.
Car personne ne dira le contraire : le phallus en prend pour son grade, un peu tout le temps, un peu partout. Il est souvent associé à la violence, au viol, à l’agression. Les mouvances récentes, celles du #MeToo par exemple, ont brisé l’omerta à plusieurs niveaux. De vrais pervers, sadiques et vicieusement conquérants, se sont retrouvés exposés du jour au lendemain.

Est-ce à dire que tout homme est un prédateur en puissance, déterminé à se satisfaire au détriment de l’autre ? Non. Certains, et heureusement, n’éprouvent aucun plaisir à cette basse besogne. 
Le problème, c’est que le pénis est stigmatisé dans l’inconscient populaire. C’est une arme potentielle. La cage de chasteté permet, dès lors, de se dépareiller du fardeau. D’endiguer le flux sanguin. De retrouver la morale, la fidélité à la caste enfin. Cela prend une coloration religieuse, selon les personnes. Chez tout le monde, il y a cette pression sociale relâchée. Symboliquement, en tout cas. 

Retrouver la pureté par une forme de perversion : le doux paradoxe d’une cage de chasteté

Comprendre l’humain, ses fantasmes, ses fétichismes, conduit systématiquement à des collisions. La logique, l’évidence s’avèrent lâche et volatile. Le contraste, lui, est permanent. 
À propos du fameux accessoire, tu remarqueras une sorte d’oxymore. La chasteté, qui renvoie fondamentalement à la pureté, s’obtient via une pratique (le sadomasochisme) généralement reconnue… comme impure. 
Le seul moyen de résoudre cette tension, c’est de rappeler, encore et toujours, la notion primordiale de jeu. Ta maîtresse n’a aucune solution miracle aux difficultés que présentent les relations sociales. Elle n’est pas psychologue, en outre.
En te faisant porter la cage de chasteté, elle flatte tes fantasmes, elle te soumet au sein d’un microcosme érotique. Les autres, les gens ne le verront pas. Mais toi, tu auras vécu, tu vivras cette excitation du soumis castré, de l’eunuque désexualisé. Et il y a de quoi jouir tout autrement.